
Désireux de construire une organisation à l’image de l’Union européenne, le Mexique propose de remplacer l’Organisation des États américains(OEA) par un nouvel organisme régional autonome, libre de toute influenece d’une quelconque partie.. Une proposition soutenue notamment par la Bolivie et le Venezuela mais rejetée par la Colombie, qui considère que les relations devraient plutôt être renforcées avec les États-Unis et le Canada.
Le président Mexicain Andres Manuel Lopez Obrador a proposé le week-end dernier de remplacer l’Organisation des État américains par un organisme autonome qui soit libre de toute influence d’une quelconque partie. Cette proposition a été faite à l’occasion de la commémoration de la naissance du libérateur Simon Bolivar, en marge de la réunion de la communauté des États de l’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) à Mexico, le samedi 24 juillet 2021. Le dirigeant mexicain déclare vouloir construire une organisation régionale d’intégration à l’image de l’Union uuropéenne.
«La proposition n’est ni plus ni moins que de construire quelque chose de similaire à l’Union Européenne, mais dans le respect de notre histoire, de notre réalité et de nos identités», a déclaré le chef de l’État mexicain dans son discours lors de la cérémonie. Il a poursuivi en disant que « dans cet esprit, nous ne devons pas exclure de remplacer l’OEA par un organisme véritablement autonome, sans influence particulière, mais un médiateur à la demande et à l’acceptation de toutes les parties en conflit en matière de droit de l’homme et de démocratie ».
El Ciudadano rapporte que cette déclaration intervient après des mois de confrontation entre la diplomatie mexicaine et le Secrétaire général de l’OEA, Luis Almagro, que les dirigeants latino-américains accusent de favoriser les intérêts américains dans la zone. Selon Manuel Hernandez Borbolla, un reporter de RT, la proposition de Lopez Obrador vise à contrecarrer l’influence hégémonique des États-Unis sur l’Amérique latine.
Toutefois M. Obrador, actuel président du CELAC n’écarte pas la possibilité pour les États Unis et le Canada d’intégrer le nouvel organisme. Cependant, il recommande que cela soit fait sur la base de la reconnaissance de la souveraineté des nations, contre les tentatives de coercition qui ont prévalu dans le passé. Une proposition qui, d’après lui, devrait convenir à Washington face à la croissance économique de la Chine, avant d’enchainer en disant : « Nous ne sommes pas un protectorat, une colonie ou leur arrière-cour ».
Une proposition qui fait divergence
De la part des autres dirigeants de la région la proposition semble ne pas être approuvée à l’unanimité. Le président de la Bolivie, membre de CELAC, Luis Arce exprime son soutien à son homologue Mexicain. «Nous faisons échos aux paroles de notre frère, Lopez Obrador, dans l’idée de remplacer l’OEA par un autre Organisme véritablement autonome, qui exprime les équilibres régionaux, respecte l’autodétermination des peuples et ne laisse pas de place à l’hégémonie d’un seul Etat », a-t-il écrit. Le Venezuela de Nicolas Maduro lui aussi est en faveur de cette proposition. Toutefois, il propose de renforcer le CELAC comme substitut de l’OEA.
La Colombie par contre s’oppose à une telle vision. Elle considère que l’intégration régionale devrait rechercher des relations « plus étroites » avec les États-Unis et le Canada. La presse argentine et les analystes croient que l’ambition de créer ledit organisme est à la base d’une manœuvre politique en vue de voir l’Argentine assurer la présidence du CELAC en 2022 afin de constituer un véritable contrepoids de l’OEA.
Les approches géopolitiques mettent à nue l’influence des États-Unis au sein de l’OEA
La proposition de Lopez Obrador semble arriver dans un paysage géopolitique que les acteurs décisifs restent encore à déterminer. Qu’il soit au Chili, au Brésil, en Colombie ou en Argentine, des élections présidentielles sont prévues entre la fin de l’année en cours et 2022. Les nouveaux élus de ces élections seront cruciaux pour la viabilité politique de la proposition de Lopez de créer ‘’une organisation multilatérale plus équitable face aux intérêts américains sur le continent’’, relate un quotidien.
Du côté des experts, la menace que représente la croissance économique de la Chine et le leadership de Mexique sont, entre autres, autant de facteurs clés pouvant aider à la promotion d’une nouvelle intégration continentale. Anibal Gracia chercheur au CELAG : Centre Latino-Américain Stratégique de Géopolitique, estime que la probable deuxième vague de gouvernements progressistes en Amérique Latine permettrait un autre type d’intégration en dehors des États-Unis, de manière un peu plus autonome. Sa considération vient en fonction de la situation de la crise du modèle néolibéral en Amérique latine. D’après ses analyses, le temps où les États-Unis accumulaient les pouvoirs au détriment de la grande majorité est résolu à cause du nombre considérable de manifestations qui ont eu lieu dans les différents pays d’Amérique latine.
Le chercheur en relations internationales à l’université de Guadalajara, Jesùs Lopez Almejo, estime pour sa part, que l’OEA n’a jamais été un projet d’intégration américaine, mais plutôt un instrument pour réduire l’influence du communiste dans la région au cours de la guerre froide. Il estime positive l’idée de Lopez Obrador, mais prévient qu’il serait difficile de créer un organisme dans la région qui mettrait de côté les États-Unis et d’espérer voir Washington qui coopère sur un même pied d’égalité que les autres pays.
Clashisky D. LAROSE et Kesnel PREVAL