Nitza Cavalier raconterait-elle son histoire : « À travers une âme » ?

Le récit primé de Nitza Cavalier au Prix international d’écriture francophone intrigue beaucoup de lecteurs qui y décèlent des similitudes avec des épisodes de l’histoire de la jeune écrivaine. Simple coïncidence ou réalité ?

Nitza Cavalier, co-lauréate du Prix international d’écriture francophone est distinguée pour sa nouvelle « À travers une âme ».

Dans ce texte, Nitza fait ressortir l’impuissance, l’arrachement au réel d’une âme. Une âme errant aux alentours de sa fille Ornella exilée en Guyane qui s’adonne à la prostitution pour gagner sa vie. Le seul moyen pour cette dernière d’échapper à ce maudit destin est  l’écriture.

Quatre grandes thématiques se dégagent  du récit

La première est le vodou

Le vodou désormais considéré comme une religion dans la société haïtienne, reste une simple pratique dans de nombreux pays avec différentes appellations. En Guyane, là où se déroule l’histoire d’Ornella, on parle de « Tchen Bwa ». Le vaudou haïtien est présenté comme étant la seule solution possible pour que l’âme puisse communiquer avec sa fille. « Je sais que le vodou peut tout, c’est une science exacte », a dit l’âme tentant désespérément de communiquer avec sa fille.

La seconde est la migration

Suite à l’assassinat de son père, Ornella  quitte le pays dans de mauvaises conditions. Tel est le cas de nombreux jeunes qui laissent le pays pendant ces dernières années. Pour échapper à une mort précoce, ils ne rechignent pas devant  les moyens comme les bourses d’études, maitrise, mariage arrangé et autres.

La troisième, la prostitution

Loin de leur terre natale, il faut trouver des moyens pour survivre et rester dans le pays. La petite Ornella, quant à elle, s’est adonnée à la prostitution, peut-être qu’elle a choisi la facilité, mais elle aurait pu devenir femme de ménage, caissière, nounou comme l’a souligné l’auteur dans le texte. C’est également le jugement que l’on porte souvent sur les femmes qui pratiquent cette activité, sans penser que les hommes et les autres femmes qui se marient pour obtenir leurs papiers de résidence font aussi de la prostitution.

Le quatrième et dernier est l’écriture

Partagée entre les pleurs et la solitude de sa petite chambre, Ornella a déjà un plan B pour changer sa situation. Cette jeune femme, avec un don pour l’écriture, voulait à tout prix remporter un concours d’écriture offrant un voyage en Guinée (Afrique). Ce voyage représente pour elle un retour sur la terre de ses ancêtres et aussi un nouveau départ.

Pour participer à ce concours, Ornella entend reprendre La légende de Makandal. Un prince dont la seule mission était de sauver son peuple. Un héros qui a pratiqué le marronnage pendant 17 ans, et lorsqu’enfin on a réussi à l’attraper, s’est métamorphosé en papillon noir, signe très souvent associé à de mauvais présage. Si dans la légende, il symbolise la terreur  pour les blancs, il reste pour les esclaves un étendard sur le chemin de la liberté.

La spécificité de cette œuvre de la jeune écrivaine réside dans la technique utilisée, celle de la mise en abime. Un procédé qui consiste à  placer à l’intérieur du récit principal, un récit qui prend de façon plus au moins fidèles des actions ou des thèmes de ce récit.

« Je pense que ma technique narrative est un point fort du texte ; l’objet de la littérature reste la littérature », a confié Nitza Cavalier.

Rose L. Fatal

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