L’explosion démographique en Haïti, est-ce vraiment un blocage pour la croissance économique ?

Le démographe et économiste haïtien James Louis répond à cette question et recommande le bonus démographique  assorti d’indicateurs de contrôle comme les programmes de planification familiale.

La population haïtienne s’accroit de plus en plus chaque année soit 1,34% en 2020 par rapport à l’année précédente. Elle se chiffre déjà à 11 905 897 d’habitants en 2021, estimation de l’IHSI.

Bien que considéré comme l’un des trois (3) pays les plus urbanisés de la Caraïbe par la banque centrale en 2018, Haïti ne connait pas de croissance économique. Son PIB a subi une baisse de 1,7 % durant la période 2018-2019 favorisant une inflation de 19,2% toujours, d’après l’IHSI.

Dans un rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture(FNUAP) paru le 22 janvier 2020, près de 4,1 millions d’Haïtiens sont en insécurité alimentaire soit environ 40% de la population.

D’un autre côté, d’après les données de la Banque mondiale en 2020, 50 % des habitants de la presqu’île sont en âge de travailler et se répartissent comme suit : 67% en milieu urbaine et 55% en milieu rural. Mais malheureusement, 70% de cette population active reste inactive.

Le démographe explique

«Lorsque le problème d’explosion démographique se pose, il y a lieu de considérer deux concepts jouant le rôle de régulateur de cette explosion en question: le dividende démographique et le bonus démographique », explique le démographe James Louis.

Entre dividende démographique et bonus démographique

« Le dividende démographique tend à limiter les naissances afin de produire des dividendes qui seront réinjectés dans l’économie pour créer plus de bien-être».

Mise en garde, « la politique de dividende démographique va entraîner une rupture à la fin du cycle. La population jeune étant limitée, le financement des plus vieux ne pourra pas se faire comme prévu par le cycle de vieillissement ».

« C’est le cas des pays comme Canada et France qui, à cause de leur population vieillissante, sont obligés de recruter des jeunes afin de financer la retraite des vieux », renchérit le démographe.

Le « bonus démographique » prend le contre pied du dividende démographique en considérant la population non pas comme une charge pour l’économie mais plutôt comme des ressources humaines disponibles. Ce sont les jeunes qui consomment », argumente le démographe pour mettre en lumière le fait que ces derniers sont une force de travail pour supporter l’économie en termes de production mais aussi de consommation. Par conséquent, la demande dans l’économie est plus élevée par rapport à une population plus vieille », a-t-il remarqué.

Pour illustrer, le démographe a pris le cas de plusieurs pays comme la Chine l’une des grandes puissances économiques mondiales, et plus près de nous la République dominicaine qui ont porté leur économie sur le bonus démographique et ont investi dans l’employabilité de leur population active.

« Cependant, la population étant en croissance, si aucune structure de création de richesses n’est créée, cela peut provoquer une inadéquation entre la production des richesses et le besoin des gens », alarme-t-il.

En clair, le dividende démographique porte sur le contrôle des naissances et le choix de réinvestir ses plus-value dans d’autres secteurs porteurs du bien-être tandis que le bonus démographique favorise l’utilisation de l’apport en « capital humain » comme source de croissance économique.

Pour une meilleure utilisation des ressources humaines en Haïti

La meilleure formule, selon M. James, serait de favoriser le « bonus démographique » tout en posant des balises permettant de réguler la population. « Pour le cas d’Haïti, j’aurais encouragé le bonus démographique tout en veillant à contrôler l’explosion démographique en ajoutant des régulateurs comme les programmes de  planification familiale».

Toutefois, « la croissance ne suffit pas pour parler de développement. Pour qu’il y ait un développement réel faudrait-il bien qu’en plus d’avoir une économie en bonne santé, faire une bonne réparation des richesses», a-t-il pris le soin de notifier.

Marc Igor Alexandre

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