Le tambour traditionnel haïtien

Objet sacré autant qu’instrument musical, le tambour revêt une dimension symbolique en Haïti. Quand il résonne, il fait vibrer tous les Haïtiens quelle que soit leur foi religieuse ou leur appartenance sociale. Par son symbolisme, il ramène aussi bien au passé qu’il projette vers l’avenir.

Impossible d’évoquer la culture haïtienne  sans parler du tambour. Principal socle sur lequel la cadence des rites est communiquée. L’expression vive des cris qui font sortir nos émotions : peur, joie de vivre, frustrations et désirs deviennent palpable grâce  au tambour.

Accompagnant les joies et les peines de tout un peuple, il est sacralisé. Si le tambour est très présent chez nous et est joué sur n’importe quelle marmite, bout de table ou encore les bancs de l’école, seulement les initiés et les choisis peuvent se prévaloir du titre de tambourineur.

Ti-Bady, batteur de tambour et hounsi à Jacmel, depuis vingt-six ans, nous confie que le tambour est le pilier principal des cérémonies et des rituels vaudou. « À mon sens le tambour est ce qui nous permet de faire revivre les ancêtres. Ce qui nous rapproche le plus d’eux, ce qui nous ramène loin, très loin dans notre passé .Certaines fois, on peut même sentir  leurs souffrances ou même leurs peines à travers le son dégagé par le tambour. Mon père était tambourineur et chef de rara. Que serais-je sans le tambour ? Les loas m’ont choisi dès le berceau pour être celui qui joue sur le manman tanbou, transgresser à cela serait un signe de non-respect aux loas et à ma famille » poursuit-il.

Dimension culturelle et spirituelle du tambour

D’effets saisissants aussi bien qu’immédiats, le tambour ne laisse personne indifférent. Nul ne peut se soustraire au son produit que produit cet instrument et objet sacré. Les battements jaillissant du tambour interpellent et invitent au déhanchement, ramenant ainsi chaque Haïtien à ses origines. Quelque soit sa confession de foi, le tambour nous touche, nous surprend, nous interpelle.

‘’Quant à moi, le tambour me transcende notamment Azor. Il me fait danser, me fait vibrer.  Ses chansons réveillent l’haïtien en moi, il donne la cadence d’une forte décharge  pulsée et auditive. Et souvent même à l’église, parfois distrait, je me mets à battre des pieds ou me laisse emporter totalement par le rythme. Surpris, je réalise que je suis dans un espace où il n’est pas permis de danser, nous raconte Sorel Jean, membre de l’Église baptiste de la foi.

Du religieux au profane, passant par les domaines artistiques et littéraires, cet instrument éveille dans l’âme haïtienne des émotions puissantes et interpelle l’Haïtien au plus profond de son être. De ce fait, même si l’haïtien se convertit au monothéisme, ils gardent avec eux le son, et les rythmes parce qu’ils vivent en eux comme le créole.

Pour Sherlande Michel, baptisée à l’église baptiste de la fraternité, le son du tambour est lié à la vie, sa célébration, ses hauts et ses bas. Il représente la beauté d’une nation et toute son histoire.

‘’J’adore les manifestations culturelles a la faculté d’ethnologie, les vibrations de l’espace agissent sur moi comme catalyseurs d’énergies. ‘’ nous explique-t-elle enthousiaste.

Indissociable du vaudou, le tambour qui a longtemps fait objet de rejet par le monde religieux semble aujourd’hui être magnifiquement accepté dans les églises. Le tambour cet instrument qui a toujours rythmé le quotidien de l’Haïtien charrie une dimension symbolique parce qu’il mobilise et rassemble autour du passé.

Dayanne CODIO

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