Haïti dans la Seconde Guerre mondiale : un effort national coûteux

La participation de la République d’Haïti dans la Seconde Guerre mondiale a beaucoup coûté et a eu des conséquences néfastes pour le pays. En fait, partagé entre l’influence francaise et américaine, le pays a déclaré la guerre à l’Allemagne et consorts, puis pris une part active à la Seconde Guerre mondiale. Cela, en solidarité aux États-Unis bombardés par l’aviation japonaise dans l’attaque du Pearl Harbor.

L’ancien président haïtien, Elie Lescot, a conduit Haïti, Première République noire indépendante du monde, dans la Seconde Guerre mondiale, durant la période allant de 1939 à 1945, en déclarant ouvertement la guerre à l’Allemagne, à l’Italie et au Japon, principaux pays formant le camp de l’Axe.

Pour justifier la position haïtienne dans cette aventure, le Dr. Joseph Bernard Jr., rapporte dans son article « Haïti et la Seconde Guerre Mondiale », publié dans le quotidien Le Nouvelliste, en septembre 2019 que le président Lescot, a proclamé au peuple haïtien que ces déclarations de guerre ne sont pas symboliques, mais plutôt, expriment un geste de solidarité envers les États-Unis, considérés, selon lui, comme la ‘‘grande amie de la République’’ et dont la cause devrait être celle de son pays et de tout le Continent américain.Ce soutien inconditionnel aux Américains vient, suite à l’attaque de la base américaine du Pacifique Pearl Harbor par l’aviation japonaise.

Le président, Elie Lescot  s’est empressé de solliciter la permission du Comité permanent de l’Assemblée Nationale, entre 8 et 12 décembre 1941 pour déclarer la guerre à l’Axe. Il s’est aussi adressé à son homologue américain, Franklin Delano Roosvelt, pour lui affirmer que « Le Gouvernement et le peuple haïtiens, profondément indignés par la lâche agression japonaise dont ont été victimes des possessions américaines vous demandent de considérer que la République d’Haïti est totalement liée aux États-Unis dans une pareille conjoncture. »

Le prix politique de l’effort de guerre haïtien

Par la suite, « toute une série d’actions politiques ont été posées », se rappelle l’historien Bernard Junior. Il s’agit des différents décrets et décrets-lois pris par l’ancien président, tous, visant à persécuter les Allemands et les Italiens ainsi que leurs entreprises, se trouvant sur le sol haïtien, dans l’unique but, affirme l’écrivain Bernard, de plaire à l’Oncle Sam, désormais devenu le Métropole haïtien aux dépens de la France, ancienne puissance colonisatrice d’Haïti.

«Lors de la Seconde Guerre Mondiale, une campagne de persécution commanditée par les États-Unis  fut enclenchée dans toute l’Amérique latine et la Caraïbe et un arrêté du gouvernement haïtien en date du 8 septembre 1941 allait mettre en application sur le sol haïtien cette chasse aux sorcières commanditée par l’Oncle Sam »,  raconte Bernard Jr.

Un apport financier de 20 millions pour des conséquences néfastes

Selon l’historien Georges Michel, Haïti a fourni un support considérable aux Alliés, notamment aux États-Unis et à la France. « Haïti a installé des bases militaires au Môle saint Nicolas qui servaient à déstabiliser les sous-marins ennemis », raconte l’historien. « L’aéroport près de la baie de Port-au-Prince a été construit et asphalté, celui de Bowen-Field qui permettait le transit des avions américains qui allaient ravitailler des troupes en Italie et en Afrique. Plusieurs terrains d’aviation ont été construits à Anse-à-Pitres et à Belladère », décrit l’historien Michel.

En outre, le gouvernement haïtien consacrera un apport logistique, non pas des moindres à sa «Grande Amie » comme disait Lescot. Notamment, en argent, en ressources et en aide humanitaire. « Les ministres Gaston Margron et Georges Honorat du président Dumarsais Estimé, convoqués en 1947 devant la Chambre des députés, estiment l’effort de guerre haïtien à 20 millions de dollars américain », peut-on lire dans un article paru dans le Nouvelliste la même année. En terme de ressources humaines, le gouvernement haïtien a envoyé un certain nombre de soldats se battre aux côtés des Français, rapporte AyiboPost. Pas moins de 300 juifs ont trouvé refuge en Haïti, avec possibilité d’obtenir la nationalité haïtienne, stipule un décret-loi pris en 1939.

Les historiens haïtiens croient que l’effort de guerre haïtien représente, pour le moins, un ‘‘coût exorbitant’’ pour le pays. Le projet de tous les espoirs de la Société Haitiano-américaine de développement agricole (SHADA), créé le 30 juillet1941 dont le but a été de produire du caoutchouc à grande échelle, un précieux matériau dans le contexte du conflit mondial, a plutôt échoué. Au contraire, il a provoqué, selon l’historienne Martha Gilbert, l’expropriation de centaines de paysans, le déplacement de 250 000 personnes, la coupe d’un million d’arbres fruitiers et de 200 000 pins. 

Clashisky D. LAROSE et Sovensky W. JOSEPH

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