
Après treize années de long combat pour la liberté, un blocus diplomatique a été instauré sur Haïti, la première République noire au monde, pendant 20 ans de son indépendance. Malgré sa grande contribution dans la libération des autres pays latino-américains, il n’a pas été invité à la première rencontre diplomatique organisée par le Venezuela, le 22 juin 1826, entre les pays libres de l’Amérique latine.
Ce 22 juin 2021 marque 195 ans depuis qu’Haïti a été exclu du congrès de Panama. En raison de sa forte contribution dans la lutte pour l’indépendance des pays de l’Amérique latine, les historiens et certains internationalistes se questionnent encore sur le fait que la première République noire libre au monde, n’a pas été invitée à cette grande conférence diplomatique réunissant les États indépendants de la région afin de jeter la première base de coopération.
En effet, l’historien Wein Webert Athus a consacré tout un chapitre sur la question dans son ouvrage intitulé : Les grandes dates de l’histoire diplomatique d’Haïti. Selon lui, Haïti a donc une présence active et symbolique, militaire et idéologique, dans le processus de l’indépendance de l’Amérique latine .
L’indépendance d’Haïti et son isolement
Le premier janvier 1804, les anciens esclaves ont déclaré solennellement l’indépendance de l’ancienne colonie française. « Ce qui a été perçu, à l’époque, comme un véritable scandale, une anomalie historique, une provocation et une menace pour l’économie esclavagiste », a rappelé l’historien Jean Coradin dans le tome 1 de son ouvrage intitulé Histoire diplomatique d’Haïti 1804-1843 paru en 1988.
Plusieurs historiens ne mettent que la question raciale à l’origine de l’exclusion d’Haïti du congrès de Panama. C’est le cas notamment du professeur chilien, José DEL POZO qui croit dans son livre : Histoire de l’Amérique latine et des Caraïbes de 1825 à nos jours, qu’«Haïti ne fut pas invité parce que c’était une République noire». Par ailleurs, l’écrivain, Wien Webert Athus, de son coté, soutient qu’«Haïti voulait montrer au monde entier que l’ordre établi (esclavage) n’était pas une normalité et que les hommes noirs pouvaient s’auto-diriger ».
La contribution d’Haïti à l’indépendance des pays de l’Amérique du Sud
En 1806, Jean Jacques DESSALINES, premier chef de la nation, a reçu le précurseur de l’indépendance de l’Amérique du Sud, Francisco de Miranda à Jacmel, là où il créa le drapeau de la grande Colombie le 12 Mars 1806 lequel a été adopté comme le drapeau national du Venezuela. Il a été approvisionné en armes, minutions, nourriture.
En outre, 10 ans après, le président de la première République nègre, Alexandre Pétion, a reçu à deux reprises Simon Bolivar surnommé «El Libertador ». D’abord le 2 janvier 1816, cette première expédition baptisée « Expédition des Cayes » a laissé Haïti le 31 mars 1816. Ensuite, en septembre de la même année, Bolivar est retourné en Haïti et a reçu une aide plus substantielle qui allait aboutir à la libération de la région.
Jusqu’à aujourd’hui, la Espalda liberadora haitiana (L’épée libératrice haïtienne), l’épée que les premiers chefs d’État haïtiens ont donnée aux indépendantistes de la terre ferme (Amérique du Sud) est exposée au musée bolivarien de Lima, au Pérou.
Il s’agit d’une épée en acier dont la lame est de 84cm de long et 3,5 cm de large avec des décorations sur les deux côtés. Sa poignée est en bronze et arbore l’emblème de la République d’Haïti, la tête d’un lion et autre tête plus petite. Le pommeau est fait d’écaille de tortue. La gaine est faite de bronze avec les armoiries de la République d’Haïti et d’autres symboles guerriers en haut-relief, selon la description du musée de Lima.
« Il faut le répéter jusqu’à ce que les sourds l’entendent : Haïti est le pays fondateur de l’indépendance de l’Amérique et le premier pays au monde qui a vaincu l’esclavage. Il mérite mieux que la réputation qui lui vient de ses malheurs », a insisté le célèbre écrivain Uruguayen, Eduardo Galeano.
Christophane J. DORVIL