Cireur de bottes, un métier qui s’essouffle en Haïti

Boîte à outils et cloche en main, pendant longtemps les cireurs de bottes se sont empilés sur les trottoirs de Port-au-Prince. Aujourd’hui, bien moins nombreux, ils abandonnent la boîte pour se tourner vers la moto-taxi. Robenson Jean est l’un de ceux-là. A force d’épargne, il s’est constitué un petit pécule pour se lancer dans la profession de chauffeur de taxi-moto


« C’est une histoire d’évolution. La vie est une succession d’étapes » lance orgueilleusement celui qui se fait appeler Sonson. Cette fierté est de celle que l’on acquiert en gagnant sa vie à la force de ses bras. « Je ne gagne pas gros mais je n’essaie pas non plus de mener la grande vie » , ajoute le jeune homme.

Chef de famille, Robenson a trente ans. Issu d’une famille pauvre de Port-au-Prince, il a à sa charge sa mère, sa sœur, ses deux neveux et sa copine. « Je suis cireur de bottes depuis 2008, il fallait prendre soin de ma mère alors veuve. Elle a beaucoup vieilli maintenant et il faut bien que je m’en occupe. Ma sœur est au chômage et je considère ses enfants comme miens » raconte le valeureux jeune homme.

Dans ce coin de Carrefour-feuilles où il attend patiemment des clients, Sonson est accompagné d’autres collaborateurs. Nombre d’entre eux ont aussi ciré des bottes dans le passé, ils l’avouent mais refusent de s’épancher sur cette période qui les voyait gagner dix gourdes par client.


Moyen de transport très populaire en Haïti, le taxi-moto voit énormément de jeunes rejoindre ses rangs. Ricardo, doyen de la profession de cireur de bottes dans la zone de Carrefour-feuilles avoue « Il est vrai que les cireurs de bottes tournent de plus en plus dos à la profession pour devenir chauffeur de taxi-moto, je m’y suis même frotté à un moment mais je n’ai pas aimé la moto donc j’ai retrouvé ce qui a bâti ma vie ».

Selon Ricardo, « Chacun a ses raisons d’abandonner le métier qui consiste à faire briller des chaussures ». Regard désabusé et air interrogateur, il demeure néanmoins aisé de lire dans les yeux de ces jeunes cette volonté de survie qui les a fait rejoindre une carrière « mieux achalandée » et dans laquelle « on gagne plus en faisant bien moins d’efforts ».

Teressa PAULO

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