
L’organisation de référendum constitutionnel n’est pas une nouveauté en Haïti. Le pays en a déjà connu dix jusque là. De 1918 à 1987, les pouvoirs en place ont consulté l’avis populaire pour adopter à chaque fois une nouvelle constitution.
Dissolution ou caducité du parlement, révision constitutionnelle, dictature, des contextes divers ont prévalu au changement de constitution en Haïti. Convoqué en ces comices cette année 2021, le peuple haïtien attend confirmation de la prochaine date du référendum pour changer la Constitution amendée de 1987 en vigueur ou la maintenir debout.
12 juin 1918, première réalisation d’un référendum en Haïti
Sous l’occupation américaine, le président Sudre Dartiguenave a organisé un référendum constitutionnel. Après la dissolution du parlement, le peuple haïtien a été invité à voter oui ou non pour le changement de la nouvelle constitution.
Le gouvernement créa un comité de réforme constitutionnelle pour réfléchir sur le projet de la constitution. Le 8 mai 1918, le projet de nouvelle constitution a été publié. Sécurisés par des gendarmes américains et haïtiens, les citoyens ont participé au référendum le 12 juin 1918. Les résultats ont penché pour une nouvelle constitution, le oui l’ayant emporté avec 99 294 voix contre 769 non.
La constitution de 1918 jeta un regard sur le droit de propriété immobilière pour les étrangers en Haïti et ratifia les actes du gouvernement américain. À partir de là, l’amendement de constitution doit nécessairement passer par un référendum. Cette décision a fait son chemin jusqu’à l’adoption de la constitution de 1987.
Sténio Vincent et les Duvalier, des mordus de référendum
L’exercice du référendum est devenu de plus en plus fréquent sous la présidence de Sténio Vincent. Le plan politique de Sténio Vincent est caractérisé par des référendums. Durant son mandat de 1930 à 1941, il en a organisé trois : tous pour modifier la constitution.
Le contexte politique de l’époque a poussé Sténio Vincent à prendre cette mesure. 2 fois en 1935 pour amplifier les pouvoirs que la constitution lui attribuait. Le président s’est préoccupé de la révision de la constitution de 1932 et de la prolongation de son mandat. Le peuple a répondu positivement aux requêtes du chef d’Etat à 99% des voix.
Pour calmer les ardeurs du peuple haïtien contre les agissements du régime de Sténio Vincent, le gouvernement a encore procédé à un référendum le 29 juillet 1939. Ce processus référendaire s’est appliqué à amender des articles de la constitution de 1932. En particulier l’article 38 de la constitution de 1935 qui stipule que « l’élection présidentielle doit se faire au suffrage universel après que l’assemblée aura désigné trois candidats parmi les citoyens qui se seront inscrits pour briguer la présidence ».
Quand à François Duvalier, il prolongea son pouvoir à l’aide du référendum de 1964. Où il est proclamé président à vie avec 95% des votes. Ces modifications au niveau de la constitution tournaient autour de la présidence à vie, la réintégration du référendum dans la constitution et la dissolution du parlement. En 1971, il continua sur cette voie. Son fils Jean-Claude Duvalier a suivi cette même stratégie en 1983et 1985.
Les référendums s’invitent lors de la caducité du parlement
Quoique les référendums s’invitent en Haïti pour réviser la constitution, ils sont aussi utilisés lorsque le parlement est caduc. 13 juin 1927, Louis Borno réduisit l’implication du pouvoir législatif et judiciaire en modifiant la constitution. Sténio Vincent en fait de même lorsqu’il publia un décret pour dissoudre le parlement.
Différent du contexte des autres référendums réalisés en Haïti, celui de 1987a ouvert la voie à la démocratie. Lors de cette procédure le pourcentage des votants en accord avec la rupture du régime dictatorial s’est élevé à 99,8%.
Après la Constitution de 1987, le président Jovenel Moïse tente de changer la constitution. Reporté à deux reprises, les préparatifs continuent pour aboutir à la réalisation du référendum. Depuis le lundi 13 janvier 2020, le parlement de la 50e législature est caduc, le mandat des députés et de deux tiers du Sénat a pris fin.
Pharah-Djine COLIN